Julien, qui le combattit, y voit moins de détours, et moins de couches à celui qui, plus facilement qu'un oignon, se dévoile. Pour les êtres, les vérités définitives existent-elles ? Peut-on se saisir en quelques phrases ?
Marin, comme tant d'autres, était tout entier conduit par son désir de pouvoir. Ses réseaux et ses amis couvraient toute la terre. Il les sollicitait souvent, afin d'avoir un pouvoir accru, plus étendu par toute la terre. Qu'en faisait-il ? Peu de choses, sinon augmenter encore ce qui était de l'emprise et de l'étendue. Dévorer sans être rassasié accumuler sans fin, porter sa main de marquis sur le monde, et le scruter, et ne pas jouir de sa contemplation, ni même cesser de le convoiter et de, plus encore, l'accaparer. Marin était seul, profondément, et saisir entre le pouce et l'index le monde le désennuyait quelque peu, lui permettait de ne pas scruter le vide. Il n'était pas complexe. Il était un néant qui tentait, désespéré, de posséder, et plus que tout, d'être. Il était le vide. Il aspirait. Tout serait à lui, il ne serait rien. Il avait lui même tenté de se convaincre, en même temps qu'il séduisait les électeurs, qu'il se proposait un être et un destin, une série de valeurs et de projets. Il changeait de discours, non d'avis. L'homme public ne désavouait ni n'adhérait à ce que proposait le candidat. Il assistait. Il était au spectacle. Il se jugeait séduisant en défenseur des valeurs familiales, en promoteur d'un libéralisme à la française, en défenseur d'un modèle social menacé. Il l'oubliait et, d'un cynisme éprouvé, ou absolument désespéré, ce qui revenait au même, il assistait à un changement qui concernait moins son être que ses périodes et ses discours. Il passait.