C'est un prince. On aimerait voir un prince du mal. Seuls son visage et sa main sont visibles. Un manteau noir, dont on ne distingue ni les boutons ni le col, ni même les manches couvre tout, est une grande tache noire, qui s'étend aux autres manteaux, au ciel aussi, confond le ciel et les hommes, est une mare noire dont sortent des pointes d'argent, des ganses et des visages. Il y a des képis plus loin. Les généraux, l'armée entoure le prince. Il est faible sans doute, et le regard reste volontaire. L'on sent la puissance dans la main qui reste le long du corps, qui tient toujours, qui sort d'une longue tache noire, et appelle le monde à rejoindre la tache et la puissance. Une cour est en sortie, et parade, comme le prince et comme le mal paradent, s'étendent aux blanches montagnes, qui déjà aspirent à la nuit, et au long manteau dont ne sort rien, sinon de vieilles mains, des bâtons de maréchaux, les forces qui couvent, le quitteront et iront sur le monde. Sa bienveillance ne semble pas entamée, ni son sourire de qui dispose de toutes les forces de la nation.
C'est Marin. Fort et vide. On sait qu'il existe, et sa main et son visage l'attestent, et son immense intelligence, la certitude d'avoir un monde entre l'index et le pouce, l'équilibre entre la préservation et la destruction de ce monde, en lui, l'immense lassitude d'être, la fatigue d'avoir à choisir, la certitude de n'avoir rien à entreprendre, et, ce qui l'emportera, le vague à l'âme, la paresse même, et le monde sera sauvé. Rien ne sortira de la tache noire qu'une main et qu'un visage. Marin promènera son sourire usé sur le monde. Il donnera encore, à Julien, le désir plus grand que tout de pleurer. Puissance, savoir, tache qui appelle à elle les forces qui sont et qui appellent la menace... Prince du néant.
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