Notre héros cherche à circonscrire le nuage radioactif de Tchernobyl (il vient du futur). Il fait ce qu'il peut et s'entretient, avant de quitter la centrale nucléaire, avec un personnage que protège un épais équipement (blanc, longs gants, masque noir). Ils quittent des lieux contaminés. Le second personnage ôte sa protection. Un « vous ! » (c'est le héros qui est surpris) retentit. Le lecteur comprend que Gorbatchev était à la manœuvre et dirigeait la minuscule et secrète équipe chargée de nettoyer le site.
Souvenir de page lue dans un manuel d'histoire : « Le roi et la reine étaient pareillement prisonniers de l'étiquette, et ce, jusqu'à l'absurde. Un meuble perd son pied. Un commis est demandé. Il se déclare incompétent. Il appelle un chambellan, pareillement incompétent, puis le maître de, le chargé de. Le roi est réduit à des bricolages d'étudiant désargenté pour ne pas voir le meuble s'effondrer. »
Le directeur de l'École Normale Supérieure préside un cocktail (il est dix neuf heures). Discours long, pas même préparé, toujours le même, ronron des vérités dont la seule ambition est, pour des raisons de bienséance, de retarder l'hallali sur le buffet (toujours excellemment pourvu). Un maladroit fait tomber son verre. Il est dix-neuf heures, les agents d'entretien sont partis depuis trois heures. Le directeur ouvre (il dispose de la clef, fort petite, qui n'est pas un passe-partout) un local à balais et à seaux (qu'il connaît), sort un balai et un seau, et éponge l'orange.
Chacun aura compris ce que ces trois souvenirs (souvenir ou souvenirs de lecture) ont de commun. Les plus éminents personnages (deux maîtres du monde et un prélat) sont réduits à des tâches dégradantes ou dangereuses. Ce n'est pas l'alliance de la puissance et de la soumission aux choses qui m'intéresse d'abord ici. Ce n'est pas plus celle de la gloire et de l'humilité. J'aime à savoir que coïncident en eux la dignité la plus figée ; en Louis, l'orgueil, l'homme des cérémonies maîtrisées, des hommes et des règles pliant genou ; en Gorbatchev, la doctrine, la dialectique, les odes, le hiératisme sacré des convois à liserés, étoiles rouge, les lauriers pareillement rouges ; en Olivier Faron, les écritures dorées, ou pâles des thèses qui sèchent ; la dignité raide et ce que j'aime presque à ranger parmi l'efficacité. Ils ont une prise sur le réel. Entendons-nous cette prise-là est minuscule (un coca, un meuble) ou, de manière moins anecdotique, un accident nucléaire. Je suis persuadé que de moyens fonctionnaires ne taillent pas même leurs crayons. Il y a du réel dans les offices obscures qu'il faut rendre le matin, je ne parierais pas que de sous-directeurs de cabinet vivent dans un monde ou se torcher va de soi.
Ces basses œuvres relèvent moins de la nécessité que de l'efficacité. L'étiquette soviétique, royale, universitaire ont des lacunes. Gorbatchev prend son balai comme chacun (sinon ses ministres, qui n'ont aucun pouvoir) le prend. Il aime saisir le serpillère, le fait devant un visiteur important (s'il n'est pas secrétaire d'État), Reagan l'aide volontiers. Ils bavardent et font attention à ne pas se couper. De même, Reagan irait débloquer tel missile à main nu (des gants de protection, certes), Louis XIV abriterait un espion que sa propre police chercherait et dont personne ne connaîtrait l'existence, qui ne serait qu'une ombre dans la penderie. Olivier Faron beurre les tartines. Je pense à trois êtres qui somnolent pendant les cérémonies et qui pensent cantine, dortoirs, industries.
Il n'y a pas les instances qui décident et celles qui appliquent. Je pense à des sots aux plafonds décorés (Louis, Olivier, Michaël ne les ont pas appréciés une heure) qui justifieraient leur vie par ces plafonds. Je pense à ceux qui ne feront jamais qu'exécuter. Certains quittent les mocassins pour les tuyauteries. La chose va de soi. Un certain plaisir s'y mêle.
Nous ne quittons pas le pouvoir.
Souvenir de page lue dans un manuel d'histoire : « Le roi et la reine étaient pareillement prisonniers de l'étiquette, et ce, jusqu'à l'absurde. Un meuble perd son pied. Un commis est demandé. Il se déclare incompétent. Il appelle un chambellan, pareillement incompétent, puis le maître de, le chargé de. Le roi est réduit à des bricolages d'étudiant désargenté pour ne pas voir le meuble s'effondrer. »
Le directeur de l'École Normale Supérieure préside un cocktail (il est dix neuf heures). Discours long, pas même préparé, toujours le même, ronron des vérités dont la seule ambition est, pour des raisons de bienséance, de retarder l'hallali sur le buffet (toujours excellemment pourvu). Un maladroit fait tomber son verre. Il est dix-neuf heures, les agents d'entretien sont partis depuis trois heures. Le directeur ouvre (il dispose de la clef, fort petite, qui n'est pas un passe-partout) un local à balais et à seaux (qu'il connaît), sort un balai et un seau, et éponge l'orange.
Chacun aura compris ce que ces trois souvenirs (souvenir ou souvenirs de lecture) ont de commun. Les plus éminents personnages (deux maîtres du monde et un prélat) sont réduits à des tâches dégradantes ou dangereuses. Ce n'est pas l'alliance de la puissance et de la soumission aux choses qui m'intéresse d'abord ici. Ce n'est pas plus celle de la gloire et de l'humilité. J'aime à savoir que coïncident en eux la dignité la plus figée ; en Louis, l'orgueil, l'homme des cérémonies maîtrisées, des hommes et des règles pliant genou ; en Gorbatchev, la doctrine, la dialectique, les odes, le hiératisme sacré des convois à liserés, étoiles rouge, les lauriers pareillement rouges ; en Olivier Faron, les écritures dorées, ou pâles des thèses qui sèchent ; la dignité raide et ce que j'aime presque à ranger parmi l'efficacité. Ils ont une prise sur le réel. Entendons-nous cette prise-là est minuscule (un coca, un meuble) ou, de manière moins anecdotique, un accident nucléaire. Je suis persuadé que de moyens fonctionnaires ne taillent pas même leurs crayons. Il y a du réel dans les offices obscures qu'il faut rendre le matin, je ne parierais pas que de sous-directeurs de cabinet vivent dans un monde ou se torcher va de soi.
Ces basses œuvres relèvent moins de la nécessité que de l'efficacité. L'étiquette soviétique, royale, universitaire ont des lacunes. Gorbatchev prend son balai comme chacun (sinon ses ministres, qui n'ont aucun pouvoir) le prend. Il aime saisir le serpillère, le fait devant un visiteur important (s'il n'est pas secrétaire d'État), Reagan l'aide volontiers. Ils bavardent et font attention à ne pas se couper. De même, Reagan irait débloquer tel missile à main nu (des gants de protection, certes), Louis XIV abriterait un espion que sa propre police chercherait et dont personne ne connaîtrait l'existence, qui ne serait qu'une ombre dans la penderie. Olivier Faron beurre les tartines. Je pense à trois êtres qui somnolent pendant les cérémonies et qui pensent cantine, dortoirs, industries.
Il n'y a pas les instances qui décident et celles qui appliquent. Je pense à des sots aux plafonds décorés (Louis, Olivier, Michaël ne les ont pas appréciés une heure) qui justifieraient leur vie par ces plafonds. Je pense à ceux qui ne feront jamais qu'exécuter. Certains quittent les mocassins pour les tuyauteries. La chose va de soi. Un certain plaisir s'y mêle.
Nous ne quittons pas le pouvoir.
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