[dans Paris]
Pourquoi es-tu si fier ?
Tu viens de baiser. Une explication platement biologique serait acceptable.
Tu aimes tes amis ? Il y a moins de solitude et d'orgueil dans les joies de l'amitié. Tu aimes ?
Ton pantalon, ta chemise sont neufs. Tu as un nouvel emploi. Tu as été complimenté. Un nouveau disque te plaît. Il fait bon. Tu sors d'un bon repas. Tu aimes cette rue. Ton ventre est plat. Tout ce que le monde a de beau ou d'agréable te fait songer à ce que tu penses être ta beauté et ta grandeur. Tu sors de gym. Une chaleur court le long de bras et de jambes qui ne touchent pas le sol et ne portent rien. Tu viens de réussir une recette de confitures. De nouvelles lunettes de soleil.
Explique-moi comment peut naître ce regard imbécile et satisfait.
Le monde n'a pas disparu : il est le témoin que tu l'emportes sur lui. Je t'envie : une fois que tu as évoqué des doutes et des peurs qui n'existent pas, que tu prétends masquer par ton attitude et tes remarques, et ton port et ta marche – ce ne sont pourtant des portes sur rien, elles ne protègent rien – ce regard, ces rires ne disent rien que cette fierté candide, cynique, puérile, exténuée. Il y a ce sourire, ce torse immobile quand tu cours, ce front qui ne penche pas, que je n'explique pas, contre lequel lutter ou échouer n'a pas de sens. Je t'ai oublié et cent de tes frères sont devant moi.
Enseignez-moi cette fatuité qui défie le monde et les hommes : « rien n'a prise sur moi, mon jean m'a coûté cent euros ».
Pourquoi es-tu si fier ?
Tu te trouves beau à n'en pas douter. Tu ne t'es jamais demandé si tu étais intelligent, ni même cultivé (et tu as raison) : tu ne souffriras donc pas. Tu sais que la mort t'attend, tu te surprends parfois, angoissé, moins au coucher du soleil, moins dans la nuit qu'au cours d'une conversation, d'une visite au musée, qu'au cinéma, que lors de la maladie ou du décès d'un proche – tu ne saurais rien par toi-même – à penser que tu mourras : tu ne connais pas plus l'angoisse que la souffrance.
Tu viens de baiser. Une explication platement biologique serait acceptable.
Tu aimes tes amis ? Il y a moins de solitude et d'orgueil dans les joies de l'amitié. Tu aimes ?
Ton pantalon, ta chemise sont neufs. Tu as un nouvel emploi. Tu as été complimenté. Un nouveau disque te plaît. Il fait bon. Tu sors d'un bon repas. Tu aimes cette rue. Ton ventre est plat. Tout ce que le monde a de beau ou d'agréable te fait songer à ce que tu penses être ta beauté et ta grandeur. Tu sors de gym. Une chaleur court le long de bras et de jambes qui ne touchent pas le sol et ne portent rien. Tu viens de réussir une recette de confitures. De nouvelles lunettes de soleil.
Explique-moi comment peut naître ce regard imbécile et satisfait.
Le monde n'a pas disparu : il est le témoin que tu l'emportes sur lui. Je t'envie : une fois que tu as évoqué des doutes et des peurs qui n'existent pas, que tu prétends masquer par ton attitude et tes remarques, et ton port et ta marche – ce ne sont pourtant des portes sur rien, elles ne protègent rien – ce regard, ces rires ne disent rien que cette fierté candide, cynique, puérile, exténuée. Il y a ce sourire, ce torse immobile quand tu cours, ce front qui ne penche pas, que je n'explique pas, contre lequel lutter ou échouer n'a pas de sens. Je t'ai oublié et cent de tes frères sont devant moi.
Enseignez-moi cette fatuité qui défie le monde et les hommes : « rien n'a prise sur moi, mon jean m'a coûté cent euros ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire