mardi 1 février 2011

262. Bar.

Ne pas savoir, ne pas soucier de ne pas savoir, et puis ? Se désintéresser était moins grave que dire une platitude. Dire une platitude n'était rien. Nous nous connaissions. Nous savions lorsque une sottise ou, plus souvent, une banalité était imminente. Ne pas prononcer de phrases, rester dix minutes sans parler, poser son regard sur un journal oublié, ne pas le lire, ne pas même savoir que le grain de sucre que l'on scrute, que la cuillère que l'on tourne existent, ce n'était rien. Un immense « à quoi bon ? » se substituait à toute gêne, aux souffrances de la journée, à la certitude de ses insuffisances. Parler comptait peu, ou évoquer, une fois encore pour faussement s'accabler, pour s'examiner, pour accuser ou dire une fois de plus que les personnes comptent moins que les circonstances. Le bar presque vide. Les lumières oranges, basses. Il est dix-sept heures. Nous ne serons pas chassés, mais notre travail est fait, nous ne lirons plus, voilà deux, peut-être trois heures inutiles, et chères. Rien ne compte. Que le temps passe, nous savons qu'il passe, nous est indifférent.

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