jeudi 4 mars 2010

63. Premier dialogue 2.

Je n'ai pas été étonné.

Voici ce qui me déconcerte à présent. Julien Queuille et Julien ne se distinguaient pas, je l'ai dit. Je découvris qui je connaissais déjà (que je n'aurais pas cherché si je ne connaissais pas). Il m'était clair, dans son inquiétude, dans la mare où il ne noyait encore. Rien n'était surprenant : ses poses ni ses convictions, ni ce qu'il allait dire et qu'il disait. Il ne prêchait certes pas la transparence, sa fiancée avait été plus que discrète. Les photographes s'ennuyaient. Il ne montrait rien parce qu'il n'avait rien à montrer. C'était un homme secret. Il donnait un sens précis à ce secret, le même sens qu'il donnait à sa jeunesse : Tout cela n'a aucune importance.

Qu’est-ce qu’un homme enfin ? Un métier (entrain inégal), une somme de goûts, qualités et défauts à donner par deux, par trois, s'équilibrant (dont le résultat reste indifféremment, zéro), la somme de ce qui nous plaît, que tout conditionne et qui ne révèle rien ? Il était las de bières accompagnant le repas, de livres de, de pluie au soir et de vent dans les feuilles, tel déplaisir, des tièdes mouvements dont pensées, impressions, désirs sont les noms dans les conversations, qui versaient dans l'indistinction (liquide froid, sombre, emplit nos cœurs) et qui les faisaient hommes, rien de plus (nous désirions plus). Il était secret. Le secret n'immunisait pas contre plat de frites et dernier film de, chemises, cravates, motifs floraux (comme le verrou à la porte indique ce qui s'y fait, derrière) mais était une décence et une marque de bon goût. L'amitié ôtait ce scrupule. Elle rendait possibles bières et cravates.

Nous pouvons y aller : parlons de moi, goûts, projets : livre de, disque de. Parlons. Devenons amis.

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