lundi 27 septembre 2010

152. La Délivrance. Début 2.

Il me révélait tout – et sans doute trop.

C'était les nouvelles de la veille : les bévues et la bêtise quotidiennes, qui se multipliaient et s'annulaient. Une comparaison que je ne comprenais pas. Le médiocre d'aujourd'hui ressemblait sans doute à celui d'hier, si ce n'est qu'oublié, je ne pouvais voir les subtils liens qui, selon lui, les unissaient. Une blague. Un autre verre de vin. Une bière et une autre référence, érudite. Un journaliste politique qui pareillement, célébré et tout puissant, avait passé et dont il ne restait rien. Quelques princes dont certains furent bons, aimés. J'en parlerai plus tard.

Il évoqua sa vie. Son enfance, sa carrière politique. Il ne me posai aucune question. Ou plutôt, il désirait savoir, et me demandait assez ce que je ressentais et si je désirais quelque chose (verre, gâteau, cigarette, etc.). Mais ce qu'était ma vie, sinon vaguement, un titre universitaire et un domaine, les sciences politiques, le laissait indifférent. Seulement un homme, non point cet homme chargé d'histoire, sa position sociale, ses goûts, ce qu'il fait le soir et le week-end, ce qu'il lit et qui il rencontre, la marque qu'il fume et qu'il boit, mais celui qui dispose d'une étrange chose qu'il peut nommer, quand tant d'êtres pleins de perfections l'ignore, une conscience.

Et voici le marché qui ne dura pas deux jours : j'étais à sa disposition et pouvais l'interrompre pour lui demander d'être plus précis ou pour me faire servir un autre verre d'eau. Je pouvais tout utiliser pour mon projet, quel qu'il soit, dont je serai le seul maître.

Il cessa de parler. Tout cela avait duré quarante minutes. Il avait dû y penser pendant trente ans. Il paraissait déçu. Ç'avait été un peu inutile, sans doute, beau, bellement exécuté, décoratif et parfois brillant. J'ai sans doute bien fait de le laisser parler. Il en éprouvait sans doute le besoin, et je me dispensais de réfléchir, de lancer la conversation, d'avoir à parler de moi et de dire combien, moi aussi, de choses inutiles et de les accommoder des blagues qui ne font rire que nous.

[Ou burlesque ou spirituel, pas les deux]

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