vendredi 8 octobre 2010

166. Délivrance vue du ministère (II).

Il était ministre. Il ne devait pas intervenir, c'est ce qu'il se dit les dix premiers jours. Le premier ministre parla. La nation se recueillait devant le poste depuis dix jours, et se faisait peur, n'osait ne demander si elle voulait que le feu cessât ou augmentât, sans oser se dire qu'elle désirait de plus grandes flambées, se désennuyer un peu. La nation avait tout de même un peu peur. C'est pourquoi il avait dû parler. Ces choses relèvent, disait-il, de Monsieur Queuille. Monsieur Queuille alors d'envoyer les diverses unités prévues lorsque les voitures brûlent. Les blessés ajoutèrent au feu. Il ajouta des unités aux unités. Associations et habitants dénonçaient l'escalade de la violence, les représailles, parlaient dialogue, cessez-le-feu, respect. Le respect était si partagé des deux côtés qu'on finit par être blessé et par mourir. Les trêves possiblement envisagées – entre militaires et moins qu'adolescents – furent oubliées. Les projets pareillement oubliés, assises des banlieues, Grenelle des banlieues, Plan Marshall des banlieues, cahiers de doléance des banlieues, et emploi, humiliations sociales, racisme ordinaire (largement partagé), urbanisme, etc. et tous les mots qu'il n'est pas vain toutefois de prononcer, chaque fois que la banlieue, brûlante, est sommée de se présenter à nous, bloc de mystère ou de trop grandes certitudes, comme un mal avec ses symptômes, dont l'origine peut-être, est trop peu (ou trop) connue, qui attend la médication.

Chacun voulait à présent, la classe politique unanime, habitants unanimes, la nation parlant d'une voix que cela cessât. Qu'une commission se charge et enregistre, qu'on programme, dialogue, prévoie, propose, promette. Mais ces feux dans la nuits, angoisses ou grandes joies, devaient être éteints.

Nous nous trouvons dans le bureau de Julien Queuille. Responsables convoqués, sous-ministres présents. Le président l'autorise à prendre les mesures qu'il jugera bonnes et utiles.

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