mercredi 20 octobre 2010

191. Brûlent les voitures (début).

Sommes nous des assiégés ? Nous sommes devenus des vieillards. Voici notre colère, nos menaces, notre courroux qui ne se manifeste jamais. Notre voix tremble quand nous menaçons. La peur gagne chaque instant de nos journées. La nuit ne nous délivre pas. Nous hésitons à frapper ou à nous soumettre, mais nous reconnaissons volontiers notre faiblesse, nos erreurs passées, celles que nous commettons encore. Nous regrettons de n'être pas l'objet d'une malédiction. Que nous puissions agir, réussir... Nous avons des passions de vieillard : le calme, la permanence d'un monde que nous aimons, que rien n'arrive.

Sommes-nous fous ? Nous sommes épuisés par ce qui ne finit pas d'empirer, par ce qui tient et craque. Nous lisons la haine, la peur, la douleur, les menaces, nous les désirons. Chaque cri nous est adressé, et si ce n'est pas personnellement, menace ce que nous représentons, ce que nous sommes. Les insultes écrites sur les murs, les noms que nous ne connaissons pas, chaque banc cassé, l'herbe qui ne repousse pas, les affiches, chaque lieu qui fut tranquille, et qui n'aspire qu'à la laideur nous menace. Ce cri de bête, était-ce de la douleur ? Les victimes mêmes nous menacent. Ce malaise vient d'un monde barbare. Nous l'avons créé, nous ne le comprendrons pas. Notre haine et notre peur l'emportent tellement sur celles de ce monde. Il menace, promet de nous détruire.

Nous enverrons, sans nul doute, le feu du ciel. Et ce que nous désirions : le calme, la page de nouveau blanche, le crime sans doute, mais dans sa simplicité, et sa pureté, ne nous sera pas offert. Les cris continueront, plus malades, animaux. Les phrases tracées ne seront plus des phrases. Les coups qui nous seront portés le seront plus désordonnément, par des mains plus sales.

Notre citadelle ne tient pas. Nous nous demandons encore « qu'avons-nous fait ? » sans comprendre, « que faire ? ».

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